Je déteste cette rubrique. Vraiment. C'est la rubrique des peines partagées, celle où je ne mets jamais les pieds pour éviter la gorge nouée, les yeux qui s'embuent, lire tant de détresse, c'est rude... et j'ai souvent beaucoup de mal à écrire des hommages pour mes loulous, parce que ça fait rejaillir toute la douleur, parce que les mots sont trop faibles, parce que...
Encore une fois, je suis infoutue de savoir comment commencer. Parce qu'avant même de poser les premiers mots, j'ai ton souvenir, celui-là, le flot d'émotions pures, qui m'envahit et qui me brouille la vue... cette foutue flotte qui s'échappe de mes yeux, et le cœur en miettes, et la honte de ne pas avoir réussi à te sauver, mon bonhomme... tout simplement, la douleur, qui reste, qui ne veut pas s'atténuer, malgré les efforts pour faire bonne figure ces derniers jours, le vague soulagement ressenti quand je t'ai aperçu serein, derrière mon rideau de larmes... tu me manques, tu le sais ça ?
T'étais jeune, même pas 25 mois c'est trop jeune, on n'a pas idée de partir si tôt... tu aurais pu attendre, encore... un peu plus
Je donnerais tout pour que tu puisses revenir à la maison, passer encore quelques mois avec tes copains et tes deux frangins, Thorim est malheureux, il te cherche, il déprime, il devient l'ombre de lui-même et ça me tue de le voir décliner depuis que tu n'es plus là...
Tu étais si gentil, si doux... si patient, si attentionné envers les nouveaux, si posé, un modèle de stabilité, un modèle de calme et de tendresse, une toute petite boule de coton avec un cœur immense dedans, à tel point qu'on se demandait bien comment tu pouvais contenir tout cet amour dans ton corps minuscule
Et ça, mon bonhomme, c'est sacrément dur à encaisser. Tout plein d'amour, tous les jours, que tu dispensais généreusement avec force câlins, et soudain, le vide...
Mon Lorich, tout petit bout de rat, tu étais le mouton rigolo qui aimait tout le monde. Tu faisais des bisous, tout le temps, autant aux inconnus qu'aux humains que tu connaissais, et aux copains, qui se tournaient toujours vers toi quand ils se faisaient disputer...
Il suffisait de te tendre une main, et tu ne t'arrêtais plus. Tu laissais déborder toute ton affection, tu creucreutais à n'en plus finir en nous bouffant de léchouilles, tu t'endormais comme un bienheureux en pleine séance manucure... et j'ai encore la sensation de ta petite tête toute douce appuyée sur mon pouce, avec ma paume dessus
On t'a adopté sur un coup de cœur, une portée kinder chez trinicoq, une fille adorable, qui a voulu sauver ta petite maman de son triste sort et s'est retrouvée avec une tripotée de lardons siamois, tous hooded allègrement loupés, des frisouilles et des lisses, tous adorables, tous extrêmement craquants, mais parmi eux il y avait cette mini-boule de coton plus ronde que les autres, avec un truc en plus que je ne saurais expliquer, qui a fait un grand boum dans mon cœur... c'était TOI.
TOI.
Tu m'avais tapé dans l'œil, je t'avais montré à l'humain de la maisonnée, et... double-craquage. Bah oui, c'est comme ça, nous sommes faibles... j'avais envoyé un mp et l'adoption était validée.
Puis on a eu trois de tes frangins en FA "transitoire le temps d'un covoit" à la maison, la première adoptante, Pix'it, est venue chercher son loulou le soir même. Et l'autre l'adoptante n'a plus jamais donné signe de vie après moult relances, et "ses" deux ratons sont restés avec toi, avec l'accord de trinicoq... mes trois merveilleux
Toi et tes frères. Le trio indissociable, mes imprévus, mes trois nez-sales, avec la santé la plus fragile qui soit mais aussi les personnalités les plus douces et les plus enjouées qu'on puisse imaginer... Et aujourd'hui, mon merveilleux trio est tout cassé, t'es parti, il y a un lien qui s'est brisé, je pleure en papouillant tes frères, je n'arrive pas à me faire à ton absence...
Lorich, j'ai mal, je n'ai pas pu te sauver... tu as commencé à décliner, début juin, une baisse de forme, un léger début de parésie, c'était insidieux, c'était faible, on est allé chez la véto, tu l'aimais beaucoup d'ailleurs et tu lui as léché les mains comme toujours... Il n'y avait rien de spécial, à part ta gentillesse qu'elle a commenté comme à son habitude.
Tu avais toujours tes saletés d'abcès chroniques au ventre qui se pointaient de temps à autre, et tes soucis respiratoires, chroniques également, mais à part ça rien d'anormal, tu restais égal à toi-même...
On t'a boosté avec une petite cure de propolis, et ça allait mieux, j'étais rassurée, tu barbotais dans ta piscine et creucreutais comme jamais. Tout allait bien. Jusqu'à ce 21 juin, la fête de la musique, je me préparais pour y aller et je t'ai vu chuter d'un étage, du coin de l'œil, alors que j'allais sortir. Je t'ai pris pour te rassurer, te papouiller, et là, l'angoisse totale : tu étais mou, très mou, un peu chaud même... le matin même tu allais bien pourtant, je n'ai pas compris...
Je suis restée pour te veiller, t'aider à t'hydrater, on a passé la nuit à alterner les câlins et les cuillères de blédine et purées... Le lendemain matin, on courait chez la véto, la boule au ventre.
Le diagnostic ne nous a pas enchantés, loin de là. Une atteinte de la moelle épinière, potentiellement infectieuse, une belle saleté qui t'avait salement affaibli... alors on a débuté une petite routine avec des purées pour que tu manges en t'hydratant, de la blédine au miel, des vitamines, ton traitement, et ça semblait aller mieux...
Puis le 27 juin, alors que tu avais bien remonté la pente, j'ai dû passer ma journée à bosser, sans avoir le temps habituel à t'accorder, je t'avais donc laissé une grande assiette de blédine bien liquide, des quartiers de fruits que tu aimais, ton jus de pommes coupé d'eau, tes biscuits au sésame, tout était à ta portée...
Huit heures plus tard, j'ai enfin eu une minute de "temps libre", pour toi, et c'est là que j'ai compris que tout était foutu... en même pas une journée tu avais tout reperdu, tu étais tout déshydraté, très faible, brûlant. Tu étais encore plus mal que lors de ta visite précédente chez la véto
Je n'ai pas compris, mon loulou, pourquoi si vite ? Pourquoi ? Je m'en veux, si tu savais comme je m'en veux... Je pensais sincèrement que ça irait, tu avais l'air en bien meilleure forme, et à cause de ce fichu boulot je n'ai pas été là de la journée et je suis passée à côté de tout ça...
Tu m'as encore couverte de bisous malgré ton état, tu te forçais à boire à la seringue, pour me faire plaisir... tu as mangé, un peu, du brownie et autres trucs interdits mais on s'en foutait, tout était bon tant que tu acceptais de te nourrir, et je savais de toute façon que c'était probablement la dernière fois que je te tenais dans mes mains, la dernière fois que je pouvais te papouiller, avec ta petite tête douce appuyée sur mon pouce...
Ma véto a tenté un dernier traitement de choc, fol espoir... j'avais baissé les bras, je m'étais résignée, et cette ultime lueur était venue réchauffer mon cœur, je voulais tant que tu t'en sortes...
Il était trop tard. Tu as fait un choc septique... tu bleuissais quand on te touchait, tout ton corps n'était qu'hématomes, tu transpirais la douleur, tu étais faible, fiévreux, incapable de te mouvoir... tu ne reconnaissais plus rien ni personne. Je n'ai même pas pu te dire aurevoir mon petit cœur, savoir que tu avais si mal... je n'ai pas voulu t'imposer quelques minutes de souffrance de plus par égoïsme, le temps d'aller à la clinique... J'ai donné mon accord à la véto au téléphone, et ma voix s'est brisée, je n'arrivais plus à parler, j'ai raccroché.
Je me suis préparée, je savais que tu ne serais plus là quand j'irais te chercher. J'ai récupéré ton corps sans vie...
C'est terrible de ressentir des choses aussi contradictoires en ces moments-là. J'ai eu atrocement mal, une implosion de chagrin quand j'ai pu te toucher. Et j'ai aussi, étrangement, été soulagée : tu avais l'air si serein et si "vivant" après ces heures qui te consumaient... comme si tu t'étais laissé aller à un sommeil paisible, après avoir lutté de tout ton être
J'ai honte. Je me sens coupable... tu m'as fait confiance et je n'ai même pas été là pour te tenir contre moi quand tu es parti. Je n'ai même pas été présente le jour de ton déclin, persuadée que tout irait bien...
J'espère que tu pourras me pardonner mon bonhomme
J'essaie de me remémorer tous nos bons souvenirs, mais c'est encore trop frais, ton départ a été trop soudain, et je m'en veux bien trop fort. Un jour peut-être...
Mon nounours si gentil...